Newsletter du Chanvre N°5 : juillet 2019

Les Hommes de la filière

Christophe Lubert a conçu la préfabrication des murs en béton de chanvre

Gérant de l’entreprise LB Eco Habitat à Bédée (Ille-et-Vilaine), Christophe Lubert travaille le chanvre depuis près de 20 ans. Alors que le béton de chanvre est projeté sur les chantiers, l’idée de préfabriquer les murs germe dès 2004. « Les connaissances acquises au fil des ans, notamment sur les caractéristiques à bien surveiller pour que les panneaux supportent le transport, et l’acquisition d’un atelier en 2015 avec un pont roulant nous a permis de nous lancer. Cela s’est fait en partenariat avec le cabinet d’architecte Can-Ia. Le premier projet a été lancé en décembre 2016. Alors qu’en béton de chanvre projeté, nous ne pouvons travailler principalement que de mars à octobre en neuf, avec la préfabrication c’est possible toute l’année. C’est un gain de temps considérable, un bâtiment de 1 000 m² peut être monté en une semaine et sans générer de déchets sur place. » Depuis, deux projets ont vu le jour et d’autres sont en cours. « Il est important que l’entreprise maîtrise à la fois la production du béton de chanvre et celle de l’ossature bois. » Christophe Lubert est maintenant en pleine réflexion pour construire une usine sur Rennes.


Les débouchés

Construction : la filière dans les starting block pour les JO 2024

« La construction en chanvre a aujourd’hui dépassé le stade de la démonstration », souligne Philippe Lamarque, président de Construire en Chanvre Ile-de-France. « Elle a atteint la maturité avec ses deux techniques : la projection de chanvre sur chantier (filière humide) et la préfabrication des murs en béton de chanvre en atelier (filière sèche). » Les chantiers déjà réalisés ou en cours en Ile de France constituent une formidable vitrine pour promouvoir le chanvre dans le cadre de la construction du village olympique des JO 2024. Ainsi, à Bray sur Seine, un groupe scolaire de 1800 m² est actuellement en construction en béton de chanvre projeté sur ossature bois. A Trilport, la première pierre de 45 logements sociaux (2875 m²) vient d’être posée. Un consortium a également été créé récemment avec Planète-Chanvre, Gâtichanvre, Christophe Lubert et trois charpentiers franciliens. « Ce consortium est aujourd’hui capable de réaliser des murs préfabriqués pour tout type de bâtiments. En 2020, une usine verra le jour pour répondre aux commandes des promoteurs des JO 2024. »


Alimentation : un marché concurrencé 

350 t à 500 t de chènevis sont utilisées en France (contre 1 000 t en Allemagne) sous forme de graines, huile et farine ; s’y ajoute le volume utilisé dans les produits transformés difficile à estimer. Selon l’étude d’Ecozept pour InterChanvre, avec un marché alimentaire-santé en plein développement, il existe une réelle opportunité pour le chènevis en produits basiques et également en produits transformés, mais principalement en bio. La qualité du chènevis français s’améliore d’année en année et les transformateurs disposent d’un savoir-faire qui n’existe pas forcément dans les autres pays. Mais ils doivent faire face à la concurrence de l’Europe de l’Est et surtout de la Chine. En effet, si la France exporte plus de produits et de graines qu’elle importe, l’Europe importe au total 10 000 t de graines, surtout de Chine. Le process de décorticage chinois, breveté, permet d’obtenir des graines décortiquées de haute qualité et de la farine à 50-60 % de protéines, garantie sans gluten ni OGM, adaptée aux marchés vegan, bio ou casher. D’où l’importance pour InterChanvre de travailler au Label « Chènevis de France » afin de valoriser la production française et de garantir sa qualité.


Alimentation : le chanvre fait son cinéma 

Dans la saison 3 de Paroles de terres, la websérie de Terres OléoPro, l’épisode du mois de mai (N°15) est consacré au chanvre dans l’alimentation humaine. Corinne Heusèle, productrice en Seine-et-Marne pour Planète-Chanvre vous fait découvrir les vertus de l’huile et des protéines ainsi que les différentes possibilités d’utilisation. On y découvre également que la graine peut se manger enrobée de chocolat ou bien décortiquée pour l’apéritif. Planète-Chanvre propose d’ailleurs depuis peu de la graine de chanvre décortiquée.

Retrouvez cet épisode sur https://www.terresoleopro.com/paroles-de-terres/ (N°15).


Les 2e Trophées de la bioéconomie sont lancés 

Pour la deuxième année consécutive, le ministère de l’agriculture et de l’alimentation organise les Trophées de la bioéconomie. Ce concours doté de 20 000 € récompense des projets de filière valorisant des bioressources en substitution aux ressources fossiles. Les projets doivent s'inscrire dans l'une des trois catégories suivantes : biomatériaux, chimie biosourcée, bioénergies. Les dossiers de candidature sont à déposer dans les DRAAF avant le 15 octobre 2019. Les projets doivent offrir des débouchés innovants et non alimentaires avec des solutions abouties et favoriser la structuration de filière, en intégrant l'ensemble des étapes de l'amont à l'aval. Un lauréat sera désigné par région. Les lauréats régionaux concourront ensuite au niveau national où un lauréat sera désigné pour chacune des catégories.


Sur le terrain

Le chanvre, culture prioritaire de père en fils 

Chez Nicolas Jobard, agriculteur à Fresnay (Aube) et coopérateur de La Chanvrière, avec 50 HA sur les 300 HA que compte l’exploitation, le chanvre n’est pas une culture secondaire. Quand il s’installe en 2002, le chanvre, présent sur l’exploitation familiale depuis 1970, occupe déjà cette surface pour plusieurs raisons. « On peut en produire même sur des terres légères à cailloux où le tournesol et le maïs ne passent pas. Je peux ainsi l’implanter sur 90 % de mon exploitation. Il permet de bien gérer les adventices des cultures d’hiver (blé, colza, escourgeon). Après le chanvre, la parcelle est propre ; la marge brute du blé s’en trouve améliorée. Le chanvre permet de réduire l’usage des produits phytos. Autre intérêt : les pics de travaux (semis au printemps et récolte à l’automne) sont décalés par rapport à ceux des autres cultures. D’un point de vue économique, avec une moyenne de 5 à 6 t/ha de paille et de 8 à 13 q/ha de chènevis, le chanvre fait largement aussi bien que le colza même avec le surcoût en charges de mécanisation. De plus, il n’est pas trop lié aux cours mondiaux (sauf pour le chènevis), ce qui permet de compenser les cours du blé et du colza quand ils sont bas. Cette culture est une vraie opportunité pour nos régions intermédiaires ! »


Le site de Terres Inovia fait peau neuve 

En mars dernier Terres Inovia, institut technique en charge du chanvre, a lancé son nouveau site web. Ce qui change ? Des informations personnalisées, des actualités de campagne au fil de l’eau et une plus forte interactivité avec les agriculteurs et les techniciens. Le site propose en effet une entrée par culture dont une pour le chanvre. Une fois sur la page Chanvre, il est possible de chercher les informations techniques de références par grandes périodes de la culture (préparation de la campagne, implantation, phase végétative, maturité/récolte) ; la page s’ouvre par défaut sur la période en cours. Autre nouveauté : la possibilité de créer un compte pour y retrouver des actualités et des informations techniques de référence plus personnalisées, c’est-à-dire correspondant à ses cultures d’intérêt (sélectionnées lors de la création du compte) et à sa région.


Economie

Doublement des surfaces de chanvre entre 2011 et 2017

Si entre 1997 et 2011, la surface totale de chanvre restait comprise entre 6 000 et 9 000 ha, depuis la production connaît une hausse importante de sa sole pour atteindre 18 500 HA en 2017 grâce notamment au développement des surfaces en Maine-et-Loire, Marne, Seine-et-Marne, Vendée et Jura. Les cinq premiers départements producteurs sont l’Aube (4 981 ha), la Vendée (1 525 ha), le Maine-et-Loire (1 519 ha), la Seine-et-Marne (1 497 ha) et la Marne (1 373 ha). Ces statistiques concernant les surfaces de production par département seront bientôt accessibles sur le site d’InterChanvre.


Réglementation

Chanvre et future Pac : où en est-on ?

Suite à la recomposition du parlement européen, le projet de la future Pac risque d’être amendé cet automne, voire peut-être de repartir à zéro. De ce fait, l’application de la nouvelle Pac sera repoussée au-delà de 2021 avec, entre temps, une période transitoire avec des règles à définir. Par ailleurs, en supprimant un pays contributeur, le Brexit va réduire le budget alloué. Si l’Europe souhaite encore réduire de 5 à 15 % le niveau des aides, la France cherche à maintenir un niveau assez élevé. Pour le chanvre, qui a pour l’instant une aide couplée, l’objectif est de faire reconnaître ses atouts environnementaux pour bénéficier d’une aide à ce titre. Le communiqué du Copa-Cogeca (qui regroupe les organisations professionnelles agricoles et les coopératives européennes) du 11 juin dernier plaide déjà en ce sens : « Son utilisation dans la rotation devrait être encouragée par des paiements complémentaires pour les cultures à avantages environnementaux significatifs. » Pour défendre cette position à Bruxelles, InterChanvre va maintenant avoir recours à un cabinet de lobbyistes.


Revue de presse

27 juin 2019 : Dans un article intitulé « Ils inventent les matériaux de demain », Paris Match met en avant l’utilisation du chanvre dans l’automobile avec la société APM.

27 mai 2019 : L’Est éclair (Aube) publie l’article « Du chanvre pour désherber » qui relate le paillage de chanvre (pour empêcher la pousse des mauvaises herbes) réalisé dans une parcelle qui accueillera bientôt des vignes.

7 mai 2019 : Reportage de France 3 sur la filière chanvre dans l'Yonne avec Geochanvre, la ville d'Auxerre, la coopérative 110 Bourgogne et un producteur de chanvre.

26 avril 2019 : Article du journal Le Pays Briard sur les débouchés du chanvre visés par Planète Chanvre.


Agenda

A venir

19 septembre : 5e colloque « Fibres naturelles et polymères » à l’UTT (Troyes) co-animé par APM et FRD permettra de faire un point complet sur les derniers développements dans l’utilisation des fibres naturelles dans le domaine de la plasturgie et des composites.

20 septembre : Assemblée Générale de Construire en Chanvre à Paris

Ça s’est passé

4 et 5 juillet : les 24h du Pole IAR à l’UniLaSalle à Beauvais pour les Awards de l’innovation d’IAR 2018 et des rendez-vous d’affaires avec plus de 260 participants.


18 juin : Rencontre organisée par l’association Lin et chanvre bio à Yvetot (Seine-Maritime) : visite de parcelles de lin et de chanvre, visite du teillage d'Agylin et tables rondes dont une sur "Le Made in chanvre en France" (état des lieux de l’avancée des projets en cours dans la filière chanvre textile et perspectives). Cet événement a regroupé 160 personnes dont 20 intervenants que sur le chanvre textile, venus de France, Belgique, et Italie.

Copyright Corinne STAGEN

28 mai : Assemblée Générale du Pole IAR. InterChanvre est membre du Pôle de compétitivité pour mieux servir les intérêts de la filière chanvre.


14 mai : Séminaire stratégique d’InterChanvre. Si nous devions résumer ce séminaire en une phrase, nous dirions « Plus forts ensemble ».


10 mai : Meet-up de la Solideo (Société de livraison des ouvrages olympiques) à la CCI de Paris pour mettre en relation les promoteurs intervenant sur le village olympique des JO 2024 et les entreprises en capacité de participer à sa construction.